La Personnalité Juridique : Réalité ou Fiction ?

6 Juin 2018 | Non classé

La personnalité juridique est un élément du patrimoine de chaque être humain, dés qu’il vient au monde. C’est le bien le plus précieux de l’Homme vivant en société puisqu’il va conditionner l’être humain à devenir sujet de droit, à avoir la capacité de jouir de ses biens et à respecter les obligations qui sont en lien avec ces droits.

C’est une réalité juridique qui n’a jamais fait débat car elle sous-tend l’ensemble du cortex législatif tant il est vrai que les règles de droit sont faites par les Hommes et pour eux.

Elle est surtout d’une importance capitale et peut être, sous certaines conditions, réduites ou anéanties en fonction des aléas de la vie… (Affaiblissement des facultés mentales, perte d’autonomie etc.…) qui peuvent amener le juge à ordonner une mise sous protection de l’individu qui ne peut plus se conduire lui-même dans la vie juridique.

Au début du 19ème siècle, avec le développement considérable de l’industrialisation et l’apparition des consortiums financiers destinés à financer cette évolution, cette même personnalité juridique va être reconnue et accordée aux groupements de personnes physiques réunies pour accomplir quelque chose en commun : c’est ce qu’on appelle les personnes morales.Personnalité

Il s’agit là d’une fiction juridique puisque ces groupements (sociétés, associations, personnes de droit publique) vont se voir reconnaitre, par le fait de la Loi, la possibilité et parfois l’obligation d’avoir un nom, un domicile (siège social), une nationalité, un patrimoine, la possibilité d’ester en justice pour défendre leurs droits.

Cette fiction a fait l’objet de débats théoriques, sans grands retentissements pratiques, jusqu’au jour où la Cour de Cassation (28 janvier 1954) s’est ralliée sans ambages à la théorie de la réalité pour les personnes morales en indiquant dans un attendu devenu célèbre : « la personnalité juridique appartient en principe, à tout groupement pourvu d’une possibilité d’expression pour la défense d’intérêts licites, dignes par suite, d’être juridiquement reconnus et protégés… ».

Elle a été en partie désavouée par la pratique avec l’obligation qui s’impose aujourd’hui d’inscrire les sociétés au registre du commerce, l’acte d’inscription étant l’acte de naissance de la personne morale, l’acte de radiation correspondant à son acte de décès.

Réalité ou fiction, ces problèmes purement doctrinaux vont peut-être connaitre une évolution spectaculaire et des effets pratiques retentissants dans un avenir plus proche qu’on ne croit, avec l’apparition des robots dotés d’une intelligence artificielle.

Le parlement européen s’est emparé du débat dans une résolution du 16 février 2017 par laquelle il a été proposé de reconnaitre la personnalité juridique aux robots autonomes les plus sophistiqués afin « qu’ils puissent être considérés comme des personnes électroniques responsables, tenus de réparer tout dommage causé à un tiers. »…

Les pauvres humains que nous sommes pourraient ainsi se voir confronter à des créatures humanoïdes qui auraient finalement les mêmes capacités juridiques qu’eux puisqu’elles pourraient notamment, grâce à la personnalité juridique qui leur serait octroyée, ester en justice pour défendre leurs droits, et notamment, voir limiter ou anéantir leur propre responsabilité !

Le transhumanisme est donc bien en marche, y compris au plan du droit…

Espérons toutefois que derrière cette personnalité juridique nouvelle (dite électronique !) se cacheront quelques concepteurs, garants de leurs créations, et surtout quelques assureurs si cette évolution ne leur fait pas trop peur.

L’avocat que je suis reste bouche bée devant de telles perspectives et préfère reformuler le sujet qu’il ne lui appartient plus de traiter.

La personnalité juridique : réalité, fiction… ou monstruosité ?

Rappelez moi
+
Rappelez moi!